Silvestris

« Pour remplacer la campagne, j’ai mon jardin sur mes fenêtres ; j’éprouve une joie de propriétaire à renouveler les fleurs de mes caisses, à semer des graines, et arroser mes plantes. C’est le grand luxe de mon modeste intérieur ; je trompe ainsi la destinée, me contentant de ce que j’ai, sans murmurer de ce qui me manque » *

C’est ainsi que la plante d’ornement s’est adaptée au sapiens, rendue plus belle et plus cultivable par ses habiles mains de maitre eugéniste, prête à satisfaire tous ses besoins. De Ghem à Homo, n’est qu’un pas éthymologique, celui de l’humus. De mutations en croisements inter et intraspécifiques, le sapiens, éloigné de ses racines par le béton, tente à nouveau de s’adapter, de revenir à la terre en bouclant le cycle. Et c’est ainsi que perpétuellement, le vivant modèle le vivant. Le sapiens masculus virilis modela le sapiens femella du 19^ème siècle, qui à son tour, en bonne maitresse de maison, que l’on exigeait d’elle, dompta la plante. Non celle de ses pieds bien sûr, mais celle de l’humus. Devenue objet, relique de l’extérieur dans un monde intérieur vide, un monde de la possession induisant le manque, la plante vient combler le trou de l’existence urbaine. Mais ce n’est que partiel. Le corpus à nouveau, vient fusionner avec la nature, rassasié de ses plantes domestiquées.

" Correspondance – Thérèse à Madeleine », Le Journal des demoiselles, Paris, juillet 1863, p. 218.